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samedi 20 février 2016

Album de la Semaine : Tindersticks - The Waiting Room

Tindersticks
The Waiting Room



Interview de Tindersticks, par Emmanuel Stradanica de Sound Of Violence

Cet album est probablement le plus expérimental que les Tindersticks aient sorti, bandes-originales de films exclues. Tu es d'accord avec ça ?

Ça me fait plaisir que tu me poses cette question. Je pense que l'écriture des trois albums précédents a constitué une véritable reconstruction pour le groupe. Lorsqu'on s'est arrêtés en 2003 et qu'on a redémarré en 2007, cela a vraiment été un redémarrage. Je pense que c'était une bonne chose car ça a permis de nous dire : On existe enfin à nouveau en tant que groupe! A partir de là, nous nous sommes donnés du temps pour expérimenter les choses, pour trouver une certaine excitation à cette création musicale et pour savoir la faire fonctionner. Ce fut un vrai challenge pour nous tous. Aucune des chansons deThe Waiting Room n'a été facile à terminer. Il a fallu tous ensemble nous donner à fond pour les achever. C'est pour cela que je suis content que tu réagisses de la sorte, et j'espère que bon nombre de personnes auront cette même réaction à l'écoute du disque. Il était temps pour nous de passer à autre chose.

Quelle fut justement la chanson de l'album la plus difficile à terminer ?

La plus difficile de toutes fut probablement Hey Lucinda, notamment à cause de la très, très longue histoire qu'il y a derrière. Mais d'une manière très différente, The Waiting Room est une chanson qui fut très difficile à terminer. Je tenais à ce qu'il y ait davantage de musique, davantage d'instruments sur cette chanson, mais celle-ci rejetait d'elle-même ce que je souhaitais lui ajouter, et restait déterminée à se montrer rigide et douloureuse, et magnifique également. Je voulais lui enlever sa peine, qu'elle soit plus douce, mais je n'ai pas réussi. Ce fut une sacrée épreuve de pouvoir la terminer.

Les parties vocales de Hey Lucinda ont été enregistrées il y a pas mal d'années déjà. Pourquoi a-t-il fallut attendre aussi longtemps pour qu'elle puisse figurer sur un album ? Elle n'aurait pas pu se trouver sur The Something Rain ?

Quand j'ai chanté cette chanson avec Lhasa De Sela, elle était heureuse. Et pour moi cela ne collait pas avec la chanson. Je n'arrivais pas à la comprendre. Puis Lhasa est tombée malade peu de temps après, et elle nous a quittés. Il m'était alors devenu impossible de la réécouter. J'ai eu besoin de l'éloigner de moi à cause du mal qu'elle me faisait. L'année dernière, j'ai commencé à y repenser. J'ai enfin réussi à la réécouter. Dans ma tête, je l'ai comprise d'une manière tout à fait différente. Hey Lucinda est maintenant très différente de la version enregistrée avec Lhasa. Nous avons retiré la musique de la version originale et nous avons reconstruit l'environnement musical autour des voix. C'est comme si la chanson vivait à nouveau. Musicalement, même au moment de The Something Rain, il n'aurait pas été possible de la récréer de la sorte. Il nous a fallu cette compréhension musicale pour pouvoir la terminer et enfin aboutir au résultat qui figure sur The Waiting Room. Tour le travail que nous avons abattu ces dernières années sur les bandes originales de films ou la musique composée pour le musée a constitué de toutes nouvelles expériences pour nous. Nous avons rejoué en acoustique, ce qui ne nous était plus arrivé depuis des années. Tout cela a permis d'arriver à Hey Lucinda.

The Waiting Room débute avec Follow Me, un petit instrumental, semblable à un réveil matinal. Cela sonne un peu comme une suite à toutes les bandes originales que vous avez composées. Pourquoi avoir choisi de commencer l'album ainsi ?

L'album aurait dû commencer avec Second Chance ManFollow Me en est d'ailleurs une partie. Nous avons dû les dissocier afin de leur donner respectivement plus d'espace. La mélodie provient de la bande originale du film Les Révoltés du Bounty deMarlon Brando. C'est une mélodie qui nous a accompagnés depuis huit ans déjà. Parfois je la chantais en marchant dans la rue. C'était en moi depuis si longtemps, aussi nous avons décidé qu'était venu le moment de la sortir. Nous avons travaillé dessus et tout est venu très rapidement. Ce fut la dernière chanson que nous enregistré pour l'album.

Au fond de moi, il y a un très grand souhait de réaliser un album instrumental.

C'est le disque sur lequel tu chantes le moins. Il y a trois instrumentaux dessus. Pourrais-tu un jour sérieusement considérer d'arrêter de chanter ? (rires)

Non. Mais au fond de moi, il y a un très grand souhait de réaliser un album instrumental. Le groupe aimerait cela également. Lorsque j'ai commencé à faire de la musique, j'ai acheté un lecteur cassette, puis un autre, ainsi qu'un microphone, et j'ai commencé à chanter. Je pense que j'ai toujours voulu atteindre la place musicale que j'occupe. Je joue de la guitare et je chante. Cela fait partie de moi. Certaines personnes m'ont donné l'envie de chanter. Ian Curtis par exemple, ou Nick Cave. Ce sont des chanteurs qui n'auraient jamais dû chanter qui m'ont donnée cette envie. Certes Nick Cave est un grand chanteur, mais il n'était pas né pour devenir chanteur. Ils avaient tous tellement de désir en eux de devenir chanteurs, d'être connectés avec les gens, qu'ils le sont devenus. C'est ce qui a ouvert le monde à moi. C'est un peu comme rendre quelque chose magnifique sans qu'elle ait quoi que ce soit de beau (rires). Tant de personnes au début des années 80 se sont libérées en montrant combien ils avaient de l'imagination, sans savoir bien jouer ou savoir chanter. Cela a constitué un véritable point de départ pour moi. Je suis heureux d'exister dans le monde de la musique. Mais ça n'a jamais été mon intention première.

Je pensais que la bande originale du film Les Salauds et son côté électronique vous auraient davantage influencé pour la suite...

On avait vraiment pris beaucoup de plaisir à composer cette bande originale, et quand l'occasion se présentera à nouveau, ce sera avec un immense plaisir. Mais les chansons de The Waiting Room proviennent d'un autre endroit. Quand nous préparons un album, le but n'est pas juste de satisfaire le moment présent. Nous sommes une formation unie, et notre but est d'harmoniser nos compositions tous ensemble. Pour moi, il est très important qu'il y ait une réelle cohésion entre nous tous, qu'on se comprenne et qu'on aille dans la même direction. Nous ne voulions pas sortir ce qui pourrait s'apparenter à quelque chose d'abstrait musicalement, comme la bande originale pour Les Salauds.The Waiting Room est vraiment le travail commun de cinq artistes. 

Waiting For The MoonThe Waiting Room, il y a une notion de temps chez les Tindersticks ?(Rires)

Je n'avais pas pensé à cela (rires). La partie que j'aime dans The Waiting Room est celle qui est la plus sombrement orchestrée. C'est très accompli. Quand tu penses à un album, tu penses à la vibration qu'il procure. Cette vibration n'était pas très bonne lorsque nous avons réalisé Waiting For The Moon. Mais en même temps, il y a vraiment de très belles chansons dessus. Mais non, vraiment, je n'avais pas du tout pensé à cette notion de temps lorsque nous avons enregistré The Waiting Room.

Il y avait déjà un âne sur la pochette de Can Our Love... et c'est à nouveau le cas sur The Waiting Room. Vous avez un rapport particulier avec cet animal ? (rires)

Je ne sais pas. Il y a toujours eu quelque chose avec les ânes pour les Tindersticks. Cette tête d'âne, je l'ai achetée il y a quelques années de cela, et c'est un peu mon alter-ego. Ma femme trouve que je suis une personne plus sympa lorsque je porte cette tête d'âne (rires). Nous avons une relation avec Richard Dumas depuis vingt ans. Il y a une énorme confiance entre nous, pas seulement personnellement mais également en termes de créativité. J'ai présenté ce caractère, cet âne, à Richard et tout a changé à ce moment-là. L'album devait initialement s'appeler We Are Dreamers, et avoir une pochette très spécifique, mais lorsque j'ai vu les photos de cette session de Richard, tout est devenu évident. C'est irrésistible. L'album s'appelle The Waiting Room et la connexion la plus complète avec cette pochette, cette image, ce style, cela constitue une étape supplémentaire dans la connexion avec la musique. Il y a tant de choses derrière cette photo. Elle est ridicule, triste mais aussi en même temps pleine d'espoir.

Planting Holes aurait pu conclure l'album comme celui-ci avait commencé, avec un instrumental. Mais finalement, il y a deux autres chansons ensuite. Est-ce que l'ordre des morceaux a été compliqué à établir ?

C'est toujours difficile de donner un ordre spécifique aux chansons. Mais je crois que redémarrer après cet instrumental constitue quelque chose d'audacieux. The Waiting Room est une chanson tellement intense, tellement douloureuse et je pense qu'elle n'a pas la même puissance que We Are Dreamers. Elle avait besoin d'entrer dans un espace plus ouvert tel que Planting Holes et permet ainsi à We Are Dreamers d'obtenir l'impact qu'elle mérite en se situant en avant dernière chanson de l'album. Cela nous permet aussi de rebondir une fois encore avec une chanson plus douce pour cette fois mettre un terme à The Waiting Room. On s'est longtemps demandé s'il était possible de rester aussi minimal sur le disque, parce que pendant pas sept minutes,(du début de The Waiting Room à la fin de Planting Holes) il ne se passe relativement rien (rires).

Je pense que les cordes sont très importantes pour certaines de nos chansons.

Avez-vous abandonné les cordes ?

Il y a davantage de cordes que sur The Something Rain. Je ne sais même plus s'il y a vraiment des cordes sur The Something Rain. Ah oui je me souviens. J'étais très content de réaliser un album sans section de cordes. Je pense que les cordes sont très importantes pour certaines de nos chansons comme How He Entered car rien d'autre ne pourrait les remplacer. Nous avons cherché une section de cordes très spécifique pour que des chansons compliquées puissent fonctionner, puis nous l'avons laissée de côté, avant d'y revenir, notamment pour la bande son du musée. Nous sommes très exigeants en ce sens. C'est pour cela que parfois nous devons nous en passer.

A la Philharmonie de Paris, vous aviez repris Into The Night et dernièrement vous avez contribué à l'hommage à David Lynch, une fois encore à la Philharmonie. Quand vous aviez fait cette première reprise de Julee Cruise, saviez-vous déjà qu'il y aurait ce projet musical autour de David Lynch ?

En fait, c'est parce qu'on a fait cette reprise de Into The Night que je me suis replongé dans l'album de Julee Cruise (Floating Into The Night), qui est un disque absolument exceptionnel. Il sonne toujours aussi unique et fantastique comme au moment de la première fois que tu l'écoutes. Nous avons donné quatre concerts au moment de la Philharmonie et j'ai beaucoup répété cette chanson à ce moment-là. Ce fut si facile à reprendre, je n'en reviens toujours pas. C'est vraiment génial d'avoir une telle chanson dans notre répertoire live. C'est sans pression aucune.

Vous la conserverez dans la setlist de vos prochains concerts?

Je pense que oui. J'aimerai aussi rejouer Falling car j'ai pris énormément de plaisir à la jouer lors de l'hommage à David Lynch. Pour moi, chanter une chanson de Julee Cruise c'est quelque chose de très naturel, même si nous avons des voix complétement différentes. (rires)

As-tu prévu de sortir un nouvel album solo ?

Lorsque j'ai composé mes albums solos, c'était un moment très excitant mais c'était également très compliqué avec les Tindersticks. J'avais besoin de sortir ces disques en solo pour réaliser qui j'étais sans eux, et de pouvoir faire des choix. Si tout s'était toujours bien passé entre nous, il n'y aurait jamais eu d'albums solo. Mais en ce moment, il y a un excellent rapport sur tous les plans entre nous. Aussi il n'y pas aucune raison pour que je m'échappe une fois encore en solo. Je me sens très bien entouré de ce groupe.

Line Up :
Stuart Staples
David Boulter
Neil Fraser
Dan McKinna
Earl Harvin

Label :
Lucky Dog/City Slang

Tracklist :
01 – Follow Me
02 – Second Chance Man
03 – Were We Once Lovers
04 – Help Youself
05 – Hey Lucinda
06 – This Fear of Emptiness
07 – How He Entered
08 – The Waiting Room
09 – Planting Holes
10 – We Are Dreamers!
11 – Like Only Lovers Can






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